La période d'obscurité que nous traversons appelle l'analyse et l'éclairage de nos plus grands intellectuels. Edgar Morin et Patrick Viveret ont mis depuis toujours leurs travaux au service de la compréhension de notre monde contemporain et de la manière d'en aborder les enjeux. Leurs textes se répondent, l'un appelant à définir des critères pourcomprendre ce monde qui vient, l'autre s'interrogeant sur les outils à mettre en oeuvre pour que le développement économique de nos sociétés s'accompagne d'une croissance en humanité et que la crise que nous traversons soit une chance de redéfinir enfin le monde dans lequel nous souhaitons vivre.Un appel à la réflexion et à l'action commune pour bâtir un nouveau monde.
« L'Europe a été le foyer d'une domination barbare sur le monde durant cinq siècles. Elle a été en même temps le foyer d'idées émancipatrices qui ont sapé cette domination. Il faut comprendre la relation complexe, antagoniste et complémentaire, entre culture et barbarie, pour savoir mieux résister à la barbarie. Les tragiques expériences du XXe siècle doivent aboutir à une nouvelle conscience humaine. Ce qui est important, ce n'est pas la repentance, c'est la reconnaissance. Cette reconnaissance doit concerner toutes les victimes : Juifs, Noirs, Tziganes, Arméniens, colonisés d'Algérie ou de Madagascar. Elle est nécessaire si l'on veut surmonter la barbarie européenne. Il faut être capable de penser la barbarie européenne pour la dépasser, car le pire est toujours possible. Au milieu du désert menaçant de la barbarie, nous sommes pour le moment sous la protection relative d'une oasis. Mais nous savons aussi que nous sommes dans des conditions historico-politico-sociales qui rendent le pire envisageable, particulièrement lors des périodes paroxystiques. La barbarie nous menace, y compris derrière les stratégies qui sont censées s'y opposer. »