«Je suis persuadé que l'art est l'expression d'une organisation sociale, de la société dans son ensemble, de ses croyances, de l'image qu'elle se fait d'elle-même et du monde», écrit Georges Duby.L'art et la société en fait la magistrale démonstration, en réunissant les textes majeurs de l'historien du Moyen Âge et ceux de l'amateur d'art du XX? siècle qu'il fut. Partout il déchiffre en profondeur le système esthétique dans lequel naît l'oeuvre d'art.
Peur de la misère, de l'autre, de la violence, de l'au-delà, et bien sûr au premier chef peur des épidémie : en explorant les mentalités de nos ancêtres du Moyen-âge, George Duby permet d'affronter plus lucide les dangers d'aujourd'hui. Réalisés à l'aube du troisième millénaire, son analyse et son récit demeurent d'une étonnante actualité et nous frappe autant par leurs différences que leurs similitudes.
Le grand savant qu'était Duby joue à merveille le jeu de l'entretien : vif, clair et aussi captivant qu'accessible.
"En 1987, Georges Duby participait, à côté de six autres historiens connus, à une entreprise expérimentale que je leur avais proposée. Elle consistait à savoir si, comment, à quelles conditions, sous quelles formes, un historien pouvait faire sa propre histoire. Des essais d'"ego-histoire" appelés à devenir un véritable genre.
Dans leur exploration des archives du fonds Duby, Patrick Boucheron et Jacques Dalarun ont découvert une première version à laquelle Georges Duby avait renoncé. Pas de différences radicales entre les deux versions, pas de révélations effacées. Mais l'historien avait commencé à se raconter à la troisième personne ; et cette différence de procédure engageait un tout autre rapport à l'écriture de soi et à la mémoire.
À l'heure où Georges Duby doit sa statue posthume à son style d'écrivain autant qu'à son apport scientifique à l'histoire de la féodalité, cette première tentative d'ego-histoire, rapprochée de celle qu'il avait choisi de publier, exprime sans doute sa première tentation littéraire. À ce titre, elle a paru mériter d'être ici exhumée." Pierre Nora.
À travers l'histoire et l'analyse de la vie de Guillaume le Maréchal, proclamé « le meilleur des chevaliers », Georges Duby reconstitue le théâtre de la chevalerie, l'art du tournoi, les rites de la guerre, et la place des femmes dans ce monde d'hommes où « nous commençons de découvrir que l'amour à la courtoise, celui que chantaient, après les troubadours, les trouvères, l'amour que le chevalier porte à la dame élue, masquait peut-être bien l'essentiel, ou plutôt projetait dans l'aire du jeu l'image invertie de l'essentiel : des échanges amoureux entre guerriers ».
Suivis des allocutions prononcées à l'occasion de la remise de l'épée
Georges Duby a prononcé cette conférence le 17 février 1994 au Collège de France où il occupa la chaire d'histoire des sociétés médiévales de 1970 à 1991.
En 1988, il avait publié une réunion de courts essais, présentés comme des jalons sur son parcours d'historien sous le titre "Mâle moyen âge" [Champs / Flammarion] à propos desquels il ajoutait :"Ce moyen âge est mâle, résolument. Car tous les propos qui me parviennent sont tenus par des hommes, convaincus de la supériorité de leur sexe. Je n'entends qu'eux. Cependant, je les écoute ici parlant avant tout de leur désir, et par conséquent des femmes. Ils ont peur d'elles, et pour se rassurer, les méprisent.
Mais d'un tel témoignage que déforment la passion, les préjugés, les règles du jeu d'amour courtois, il faut bien que je me contente. Je m'apprête à l'exploiter. Je voudrais en effet découvrir la partie cachée, la féminité. Ce qu'était la femme en ces temps lointains, voici ce qu'à présent je m'évertue à reconnaître." Six ans plus tard, voici un nouveau jalon.
Leçon inaugurale au Collège de France prononcée le 4 décembre 1970.
Sont ici réunis cinq grands entretiens avec des figures de l'effervescence théorique d'une époque où la psychanalyse conversait à bâtons rompus avec les autres disciplines : Foucault, Dumézil, Duby, côté philosophie, anthropologie, histoire ; Changeux et Thom, côté biologie, épistémologie.
On y rencontre le scientifique aux prises avec son objet et ce qui résiste à sa saisie. On interroge, on ferraille. L'enquête est sérieuse, le ton enjoué. Les voix vibrent, l'énonciation est fulgurante. Échanges et frottements font saillir les articulations, les jointures impossibles et l'inattendu. Le projet d'une nouvelle science de l'homme fait l'épreuve de ses failles. Ce réel indissoluble est la matière de ces entretiens menés par Ornicar ?, revue du Champ freudien.