Il est difficile de parler de Nohant sans dire quelque chose qui ait rapport à ma vie présente ou passée », écrivait George Sand. C'est par Nohant, par sa maison, que je l'ai rencontrée. À vrai dire, elle ne fut pas un modèle de ma jeunesse. Pour « la bonne dame », je n'éprouvais pas d'attirance. Ses romans, La Petite Fadette, etc., que la grand-mère de Marcel Proust tenait en si haute estime, me paraissaient bons pour les distributions de prix. Je participais à la dépréciation dont Sand a été victime après sa mort. Je la trouvais d'un âge qui n'avait plus grand-chose à dire aux filles de Simone de Beauvoir, dont je me revendiquais.
Ma découverte fut en partie fortuite. La demeure de l'Indre, héritée de sa grand-mère, représente ses racines, mais aussi un refuge contre Paris, qui fit sa renommée et qu'elle n'aimait pas, une « oasis » propice au travail : elle y écrivit l'essentiel de son oeuvre, comme Chopin y composa la majeure partie de la sienne. Nohant, elle en rêvait comme d'un phalanstère d'artistes, une communauté égalitaire, un endroit de création et d'échanges par la musique (Liszt, Chopin, Pauline Viardot), la peinture (Delacroix, Rousseau), l'écriture (Flaubert, Dumas, Fromentin, Renan, Tourgueniev...), le théâtre, la conversation.
Ce lieu, Sand l'a investi. L'art y établit la communion des coeurs et des esprits. C'est aussi une cellule politique, inspirée par le socialisme de Pierre Leroux, noyau républicain support de journaux et ferment subversif des manières de vivre et de penser. Nohant est le creuset d'une utopie, pénétrée par le désir de changer le monde.
Pas plus que personne, Sand n'a réalisé son rêve. Aujourd'hui, il nous reste ce lieu, de pierre et de papier, témoin d'une histoire d'amour aux accents infinis.
Michelle Perrot
Bien des chemins mènent à la chambre : le sommeil, l'amour, la méditation, Dieu, le sexe, la lecture, la réclusion, voulue ou subie. De l'accouchement à l'agonie, elle est le théâtre de l'existence, là où le corps dévêtu, nu, las, désirant, s'abandonne. On y passe près de la moitié de sa vie, la plus charnelle, celle de l'insomnie, des pensées vagabondes, du rêve, fenêtre su l'inconscient, sinon sur l'au-delà. La chambre est une boîte, réelle et imaginaire. Quatre murs, plafond, plancher, porte, fenêtre structurent sa matérialité.
De l'Antiquité à nos jours, Michelle Perrot esquisse une généalogie de la chambre, creuset de la culture occidentale, et explore quelques-unes de ses formes : la chambre de Louis XIV, la chambre d'hôtel, la chambre conjugale, celle de la jeune fille, du malade ou du mourant, celle de la cellule carcérale.
Une nouvelle édition illustrée de 120 reproductions d'une grande diversité.
De Cro-Magnonne à nos jours, voici, racontée par quatre femmes d'exception, l'histoire de la condition féminine, dans un dialogue mené et écrit par l'une d'elles, l'historienne Nicole Bacharan.Avec l'anthropologue Françoise Héritier, elle remonte aux origines de la " nature " féminine. A quel moment les femmes ont-elles glissé dans la subordination ? Très vite, les hommes ont voulu maîtriser leur " privilège exorbitant d'enfanter ". Ils ont enfermé les femmes dans leur prétendue infériorité. On apprend ici que le matriarcat ne fut qu'un fantasme, et la prostitution, jamais un métier...Avec l'historienne Michelle Perrot, on parcourt 2000 ans de la vie des femmes en observant chaque âge : bébé, fillette, fille à marier, épouse, mère, grand-mère... Etre une fille, c'était se voir refuser l'éducation, mariée souvent de force, surchargée d'enfants, exposée au viol et aux violences. Les rebelles, elles, payaient le prix fort...Avec la philosophe Sylviane Agacinski, nous voilà, aujourd'hui, au temps de l'égalité et de la parité. Après la révolution de la contraception, comment faire pour que l'universelle différence des sexes ne soit plus hiérarchie ? Comment construire un monde vraiment mixte ?En plongeant dans l'intimité des femmes, l'ouvrage retrace leur combat pour s'exprimer, créer, voter, aimer... C'est aussi un bel hommage aux femmes et à leur courage.
Françoise Héritier est anthropologue, professeure honoraire au Collège de France.Michelle Perrot est historienne, spécialiste de l'histoire des femmes.Sylviane Agacinski est philosophe.Nicole Bacharan est historienne et politologue.,