Support
Éditeurs
- Klincksieck (11)
- Belles Lettres (6)
- Phebus (6)
- Libretto (5)
- Le Bruit Du Temps (4)
- Points (4)
- Sous Le Sceau Du Tabellion (3)
- Anabet (2)
- Elisabeth Brunet (2)
- Isolato (2)
- J'ai Lu (2)
- L'arbre Vengeur (2)
- Carlotta Editions (1)
- Cassis Belli (1)
- Emmanuelle Collas (1)
- Nbe Editions (1)
- Omnibus (1)
- Rivages (1)
PATRICK REUMAUX
-
Le monde du dessous
Anne Brontë, Branwell Bronte, Charlotte Brontë
- Points
- Points Poesie
- 27 Octobre 2023
- 9791041411481
Nous avons tissé une toile à l'enfance, Une toile aérienne et ensoleillée.
Et dans la prime enfance détecté une source.
D'eau fraîche et non souillée.
Charlotte BRONTË.
Tout le monde connaît les soeurs Brontë :
Charlotte, Emily et Anne.
Mais le frère, Branwell ?
Et leur enfance dissimulée à inventer des mondes et des langages ?
À travers poèmes et proses inédits, ce recueil reconstruit le cheminement imaginaire - « le monde du dessous », écrivait Charlotte - au coeur de la création romanesque des Brontë et lui donne tout son sens. -
Lieu-dit l'éternité : poèmes choisis
Emily Dickinson
- Points
- Points Poesie
- 18 Février 2022
- 9782757886335
« Balayer le Coeur avec soin.
Mettre l'Amour de côté.
Nous ne nous en servirons plus.
Avant l'Eternité ».
Ce volume réunit plus de cent cinquante poèmes de l'une des plus grandes poétesses du XIXe siècle. Hantée par le néant, Emily Dickinson n'a eu de cesse de questionner la nature, la folie, la foi, l'amour et la mort. Sa poésie, habitée de fulgurances mystiques, joue autant de la gravité que de l'ironie, de l'émerveillement que de la dérision, mêlant sentiments intimes et thèmes universels avec une audace stylistique et rythmique d'une modernité saisissante.
-
Le renard et autres étreintes mortifères
D. H. Lawrence
- Klincksieck
- De Natura Rerum
- 20 Octobre 2023
- 9782252047361
J'avais un goupil de rêve, queue touffue, touffue, oreilles tachées de noir, ils l'ont tué. S'ils avaient pu, ils nous auraient tous tué, mais nous étions partis dans les montagnes, là où ils ne pouvaient pas nous tuer. Nous attendions la neige, comprenez-vous, on ne peut pas tuer dans la neige des monts. Ils avaient beau faire des comptes, entamer des procédures, faire durer le plaisir, clamer leurs bonnes raisons sur tous les toits en brandissant des preuves plus fausses les unes que les autres, ils ne pouvaient pas nous tuer.
Brandir des preuves aux assises ? Le roman est un drôle de rêve, tellement faux qu'il a vraiment l'air vrai. On ne prépare pas plus la venue d'un roman qu'on ne prépare celle d'un rêve. On voit. Ou pas. Un homme de haute stature se lave les mains... Antonia Pozzi le savait :
C'est l'hiver - mon âme - l'hiver. -
Omar Khayyâm, poète persan du XIIe siècle, est l'un des savants les plus célèbres de son temps. Ce personnage, dont la vie est entourée de mystères, était mathématicien, astronome et philosophe. Mais la tradition a également conservé de lui un recueil de quatrains poétiques, qui n'ont pas été publiés de son vivant en raison du fanatisme et de la superstition de l'époque. Qu'il soit l'auteur de tous ces quatrains ou non, les plus anciens, publiés en 1341 sous le titre Compagnons des hommes libres, sont l'oeuvre d'un grand poète dont l'inspiration est étonnamment moderne et avant-gardiste.
Sans cesse, Omar Khayyâm prêche la jouissance et l'oubli de tout sauf de l'instant, bien avant le carpe diem de Ronsard ou le memento mori que l'on retrouve chez Beaudelaire. Si les quatrains d'Omar Khayyâm tiennent du prodige, c'est qu'ils ne parlent que de mirages.
Nouvelle traduction ou comment ne pas être persan. La difficulté de la traduction tient à toujours vouloir être dans la ressemblance. Or le persan, enclin à la préciosité, aux allitérations, aux jeux de mots, aux calembours ou aux non-dits, est difficile à traduire. D'où le choix de cette nouvelle traduction. Des poèmes, oui mais en français. Une nouvelle traduction comme une invitation à retrouver l'ivresse des quatrains à l'odeur de rose - où le vin même avait cette odeur - qui enchantèrent la première jeunesse du traducteur, Patrick Reumaux, né sur les hauteurs d'Alger. Écrivain, poète, il a reçu de nombreux prix notamment pour ses traductions de la poésie du monde entier. -
Le monde du dessous : poèmes et proses de Gondal et d'Angria
Charlotte Brontë, Emily Brontë, Anne Brontë, Branwell Bronte
- Belles lettres
- 26 Mai 2021
- 9782251451992
Nous avons tissé une toile à l'enfance.
Une toile aérienne et ensoleillée.
Et dans la prime enfance détecté une source.
D'eau fraîche et non souillée.
Charlotte Brontë.
Tout le monde connaît les soeurs Brontë :
Charlotte, Emily et Anne.
Mais le frère, Branwell ?
Et leur enfance dissimulée à inventer des mondes et des langages ?
À travers poèmes et proses inédits, ce recueil reconstruit le cheminement imaginaire - « le monde du dessous », écrivait Charlotte - au coeur de la création romanesque des Brontë et lui donne tout son sens.
-
Autoportrait au roitelet : lettres à T.W. Higginson et aux sœurs Norcross 1859-1886 ; la gloire est une abeille, (choix de poèmes) 1858-1881
Emily Dickinson
- Belles lettres
- 26 Mai 2021
- 9782251452005
Voici ma lettre au Monde.
Qui ne M'a jamais écrit - Les simples Nouvelles que la Nature disait - Avec une tendre Majesté.
Emily Dickinson.
Emily Dickinson (1830-1886) passe sa vie à Amherst, dans la propriété familiale.Tombe amoureuse d'un révérend, qui s'enfuit. Elle écrit des poèmes, ne sait pas ce qu'ils valent (ou fait semblant), prend pour maître un gandin célèbre, Thomas Wentworth Higginson dont la bêtise - un siècle a passé - irradie comme un soleil. Les années filant, elle sort de moins en moins, signe ses lettres « Votre Élève », écrit encore quelques vers, s'intéresse à tout ce qui meurt.
Quand elle commence à écrire aux soeurs Norcross, en 1859, Louise a seize ans, Frances treize. Vingt ans plus tard, elles n'ont pas grandi, sont pour Emily les mêmes petites filles imaginaires. Loo a toujours seize ans, Fanny treize. « Je souhaite que nous soyons enfants, écrit-elle à son frère. Je souhaite que nous soyons toujours enfants, comment grandir, je ne sais pas. ».
La partie de la Correspondance ici traduite - Lettres à T.W. Higginson et aux soeurs Norcross - n'a pu l'être que grâce au remarquable appareil critique de l'édition américaine Harvard University Press. Les poèmes que l'on trouvera en seconde partie de volume parlent d'eux-mêmes.
Patrick Reumaux
-
Des voix sous les pierres
Edgar Lee Masters
- Belles lettres
- Poesie Magique
- 22 Octobre 2021
- 9782251452159
C'est en lisant l'Anthologie palatine qu'Edgar Lee Masters a l'idée d'une anthologie américaine, qui ferait germer sur les tombes de la bourgade de Spoon river 250 épitaphes. Dans ce recueil au lyrisme désenchanté, les morts témoignent l'un après l'autre d'existences brisées. La violence, le vice et l'hypocrisie s'étalent sans fard, les âmes se mettent à nu, « près de la rivière, à l'endroit où s'écoulent les égouts du village, où l'on déverse les ordures, les boîtes vides et le produit des avortements clandestins ». Dans ce recueil, l'Amérique des pionniers semble expirer.
« En 1914, Ezra Pound écrit de Paris à Harriet Monroe, l'éditeur du magazine Poetry : « Publiez les poèmes de Webster Ford. C'est le seul poète qui sache écrire en Amérique. » Mais voilà : Harriet Monroe ne sait pas qui est Webster Ford dont quelques « Épitaphes » ont commencé à paraître dans le St Louis Mirror de William Marion Reedy. Ou plutôt elle ne le connaît que sous le nom d'Edgar Lee Masters, brillant avocat qui écrit en dilettante des vers qu'elle s'obstine à refuser. L'homme porte des lunettes, arbore un panama. Il a un air hautain et fume du Prince- Albert dans une pipe qui ne cesse de s'éteindre et qu'il ne cesse de rallumer. Portrait de Lee Masters. Mais duquel ? Du brillant avocat, associé de Darrow, une célébrité du barreau ? Du poète secret ? Du membre du Club du Calumet ? Du père de famille ?
De l'homme à femmes ? Du défenseur des causes de l'Union ?
De l'auteur de drames en vers jamais joués ? Ou... de l'auteur mondialement célèbre de la Spoon River Anthology ? Comment concilier la sécheresse paranoïaque du Droit et les germes lyriques (ou le clivage schizoïde) de la poésie ? « L'étude du droit, écrit Masters, a été pour moi un passage aux rayons X et comme une table de produits chimiques ».
Un passage aux rayons X. On
-
Le marché aux elfes
Christina Rossetti
- Belles lettres
- Poesie Magique
- 24 Septembre 2021
- 9782251452203
Dans un texte en hommage au centenaire de la naissance de Christina Rossetti, une femme non moins talentueuse et exigeante, Virgina Woolf, s'amuse à esquisser le portrait de cette artiste complexe et discrète, muse flottante à la foi d'airain : «Vous étiez poète d'instinct. Vous avez toujours vu le monde sous le même angle. Les années, et les échanges avec les hommes et les livres ne vous ont pas affectée le moins du monde. Vous avez ignoré soigneusement tous les livres qui auraient pu ébranler votre foi ou n'importe quel être humain qui aurait pu vous troubler. Vous étiez sage, peut-être. Votre intuition était si sûre, si directe, si intense, qu'elle produisait des poèmes qui chantent comme de la musique dans nos oreilles - comme une mélodie de Mozart ou un air de Gluck. Pourtant, malgré son équilibre, votre chant était complexe. Lorsque vous jouiez de la harpe, les cordes sonnaient ensemble. Comme toutes les personnes instinctives, vous aviez une conscience aiguë de la beauté visuelle du monde. Vos poèmes sont habités de poussière dorée et de la douce et changeante luminosité des géraniums ; votre regard était sans cesse aux aguets, notant que les joncs ont des tiges de velours, et les lézards une étrange carapace métallique - il est certain que votre regard observait tout avec une intense sensualité préraphaélite, ce qui a dû surprendre l'anglocatholique Christina. Mais vous lui devez peut-être la constance et la tristesse de votre muse. La pression d'une foi intense entoure et enserre ces petits chants. Peut-être lui doivent-ils leur solidité.».
-
Sont ici réunis en un seul volume les récits africains de Llewelyn Powys, écrits lors du long séjour qu'il fit au Kenya pour aider son jeune frère Willie, à la ferme qu'il avait acquise et soigner la tuberculose qui finit par l'emporter au sanatorium de Clavadel, en Suisse. Y apparaissent en pleine lumière, la vulgarité, la rapacité et la cruauté des sujets de Sa Majesté, exilés volontaires à la Colonie, tandis que rôdent les bêtes de proie, que rugissent les lions et que se déchaînent les éléphants qui jadis étaient des hommes avant d'être chatiés par Dieu, selon la croyance des Massai, la plus fière tribu de ces lieux. A l'opposé de l'Ebène et du soleil torride de l'Afrique, l'Ivoire de la lune, la déesse froide qu'adorait Mary Cowper Powys, la mère de Llewelyn, les contes du Dorset, narrés sous le signe de l'Ivoire, rivalisent en violence et en cruauté (La Torcol, par exemple) avec ceux qui embrasent la vallée du Grand Rift.
-
CE LIVRE compile des légendes et des contes anciens d'Argentine, recueillis puis réécrits par l'écrivain et naturaliste William Henry Hudson, alias Guillermo Enrique Hudson. La première histoire du recueil est aussi la plus connue, elle s'intitule « El Ombú ». À l'ombre de cet arbre majestueux et solitaire, la voix du vieux Nicandro s'élève sur l'étendue des Pampas. Alors commence l'émerveillement.
-
La prairie ; la vie privée d'un champ anglais
John Lewis-Stempel
- Klincksieck
- De Natura Rerum
- 18 Mars 2022
- 9782252046548
« Fascinant... On a écrit des livres sur des pays entiers à la galerie de personnages moins intéressants que ceux de Lewis-Stempel et son champ aux confins du Pays de Galles. Les renards, les milans royaux et les campagnols deviennent aussi intrigants que les héros d'un drame de HBO. » Tom Cox, Observer De loin, un champ a l'air d'un seul tenant ; mais de près ? Que se passe-t-il vraiment dans l'herbe haute ?
En apparence, La Prairie est un simple journal : de janvier à décembre, John Lewis-Stempel raconte le passage des saisons, des renoncules au printemps à la coupe des foins en été et au pâturage en automne. Il dévoile les vies des animaux qui habitent l'herbe et le sol : le clan des blaireaux, la famille des renards, la garenne des lapins, la couvée des alouettes des champs et le couple de courlis, entre autres. L'histoire de leur naissance, leur vie et leur mort est une biographie intime de la vie animale.
Rapprochez-vous encore un peu, suivez les phrases ciselées de Lewis-Stempel et vous vous apercevrez, par exemple, que ce qui paraît plat ne l'est pas vraiment, que ce qui paraît petit est grand et ce qui paraît un est multiple.
En d'autres termes, vous vous apercevrez que la prairie qui enchante le regard - et l'estomac des moutons - est, à elle seule, un monde.
« Je ne vous parlerai que de ce que l'on ressent quand on travaille et qu'on observe un champ auquel on est lié depuis toujours. Tout essai de rationalisation... est inutile », nous aura avertis Lewis-Stempel.
-
Le plaisir que procurent ces poèmes-comptines, tous construits sur le même modèle est si délectable qu'il incite à en inventer d'autres, et si évident qu'il n'a guère besoin d'être commenté. « À notre sens, c'est lui [Lear] qui est, chronologiquement et essentiellement, le père du nonsense; nous le croyons supérieur à Lewis Carroll. [...] Alors que le Pays des merveilles de Carroll est purement intellectuel, Lear fait apparaître un autre élément - qui est celui de la poésie, et même de l'émotion. Lear n'introduit pas ses mots dépourvus de sens et ses créatures amorphes avec toute la pompe de la raison, mais accompagnés d'un prélude romantique aux riches couleurs et aux rythmes entêtants. » G.K. Chesterton, Le Défenseur, 1902
-
En dix-neuf poèmes assassins, publiés en 1916 dans Vanity Fair et réunis ici sous le titre évocateur d'Hymnes à la haine, Dorothy Parker n'épargne rien ni personne.
Tout y passe : les maris, qu'elle dit haïr car "ils lui bouchent la vue", les femmes, la famille, qui lui "donne des crampes d'écriture", le théâtre, les livres, les films, les fêtes... Féroce, drôle et d'une incroyable modernité, la plume de Dorothy Parker libère les frustrations et permet l'exultation de la rage et la formulation de ce qui devrait être tu.
-
Le Pré de la chèvre, longue nouvelle publiée isolément en 1937 dans une édition illustrée de gravures sur bois due au graveur anglais Gwenda Morgan (1908-1990), offre un accès des plus plaisant à l'oeuvre singulière entre toute de Theodore Francis Powys. Mr. Nutty, est un marchand d'articles de sport et notamment de ballons de football dont les rondeurs ont presque autant d'attraits pour lui que le dos de celle qui va devenir sa première femme.
Hélas, celle-ci mourra accidentellement, frappée par le ballon que son mari avait cru bon d'offrir en guise de dot à son père ! Ce malheur va inciter Mr. Nutty à s'interroger sérieusement sur "ce que signifie donner et recevoir" . Il en vient à penser qu'il n'y a qu'un seul don (dont la nature sera révélée à la fin de l'histoire) qu'hommes et femmes pourraient recevoir sans craindre aucun danger. S'étant retiré dans le hameau du Prè de la chèvre, il y observe, comme le faisait Powys lui-même, la vie des habitants de ce nouvel avatar d'East Chaldon.
Ainsi les vicaires, et tout ce que le pays compte de soutanes, sont-ils sans cesse mis en danger par les charmes de la très jeune Jenny Honeybun, qui ne répugne pas à se laisser prostituer par un maquereau affairiste. Mais la belle Jenny finira par se souhaiter "des fleurs d'oranges à son chapeau, un anneau nuptial, un chat et un canapé" . Pour cela il lui faudra croiser le chemin de Mr Nutty, qui a compris que l'amour est naturel à l'homme, ni donné ni reçu, mais lui appartenant comme droits de naissance" et que, "quand l'amour est pure joie, il n'y a pas de péché" .
Et ce sont toujours, comme l'écrit Patrick Reumaux dans son avant-propos, les mêmes questions qui hantent cet écrivain fils de pasteur et lecteur de Nietsche : pourquoi serait-il nécessaire de faire souffrir une créature pour éprouver du plaisir ? Pourquoi "même le souffle de la vie, un don dont on peut penser qu'il faut être reconnaissant, est-il souvent source de chagrin pour celui qui le reçoit" ?
-
Publié en 1916, ce grand roman psychologique, que Powys écrit en partie pour exorciser une forme de folie qu'il subit depuis l'enfance, explore magistralement les différents états de conscience d'un certain Adrian Sorio, à qui semble avoir été accordé un précaire répit avant l'inéluctable débâcle de son esprit : « Je sais que j'ai en moi quelque chose dont la vérité est démente... et qui mord les choses jusqu'à l'os. » Cet horizon tragique est dessiné dès l'incipit lorsque, de retour d'Amérique sans son fils, Sorio se laisse convaincre par sa jeune amante, l'élégante Nance Herrick, de l'accompagner dans l'East Anglia, à Rodmoor. Ce finistère au nom sinistre fait planer sur les premières heures du séjour une sourde menace. Il est habité par une petite communauté de gens bizarres : l'ancienne amante du père de Nance, Miss Doorm ; un camarade « efféminé » d'Adrian, Bathazar Stork ;
Un docteur désabusé ; un prêtre empathique ; et par la richissime Mme Rensham dont le fils Brand séduit la demie soeur de Nance, et dont la fille Philippa, « prêtresse d'Artémise » à l'instinct destructeur, tombe amoureuse (le mot est faible) d'Adrian. Cependant, comme le souligne le titre, le seul véritable héros de ce roman « dédié aux mânes d'Emily Brontë » n'est ni un homme ni une femme, quand même nous retient le va-et-vient tourmenté d'Adrian entre les deux pôles (mondain et asocial) de sa vie sentimentale, c'est bien plutôt une envoûtante lande au bord de la mer, dans le Norfolk, à l'Est des « Hauts de Hurlevent ».
Si complexes que soient en effet les protagonistes de cette histoire, ils sont soumis, au-delà de leur caractère individuel, à la grande loi des « flux et reflux » qui régit l'univers (« le bruit de la marée sur la plage de Rodmoor était l'arrière-fond de toutes choses ») ; c'est cette loi mystérieuse qui détermine leurs mouvements intérieurs, contradictoires et incessants, dont la cause leur échappe ; mais ils reconnaissent en eux l'emprise magnétique de ce paysage terraqué, fortement érotisé, et qui reflète le désir fou qu'à Rodmoor ils ont tous, ou presque, de détruire le contentement de leur propre vie : « On s'y désintègre, vous savez, on y perd son identité et on oublie les règles [....] Ce que nous cherchons, c'est la ligne de fuite... c'est la phrase même de mon livre. » Et il semble qu'en effet pour Powys la seule façon de s'évader des attaches familiales soit d'émigrer vers d'autres sphères subhumaines ou surhumaines, en somme, de se fondre dans la nature.
-
Invitation au crime
Joseph Sheridan Le Fanu
- Libretto
- Litterature Etrangere
- 14 Novembre 2019
- 9782369145462
Richard Marston, aristocrate désargenté qui a passé la quarantaine, règne sur le domaine des Hêtres Gris qu'il n'a plus guère les moyens d'entretenir, entre sa femme qu'il délaisse, sa fille encore dans l'enfance... et la gouvernante française, Mlle de Barras, invitée à tenir compagnie aux deux « dames » du lieu.
Mlle de Barras a des manières, déploie mille attentions à l'endroit de la maîtresse de maison dont elle devient vite la confidente, mais sa venue aux Hêtres Gris semble donner le signal de quelques bouleversements inquiétants. Bientôt la vie monotone et apparemment austère du manoir est troublée par l'arrivée d'un nouvel invité? : Sir Wynston Berkley, célibataire coureur de jupons qui fut jadis le rival de Marston à l'occasion d'une amourette de jeunesse. Avec lui, une porte semble s'ouvrir sur un passé que les habitants de la place feignaient d'avoir oublié. Un passé qui a la vie dure, et qui poussera bientôt l'un des protagonistes au crime de sang...
-
Les textes métaphysiques de cette anthologie des trois frères Powys s'articulent autour d'une sorte de prêche de Theodore Francis intitulé "Le Soliloque de l'ermite". Publié à New York en 1916, cette oeuvre très personnelle - une des plus grandes réussites stylistiques de l'auteur - n'avait encore jamais été traduite en français. Bien qu'il ne fasse aucune allusion à la guerre qui sévit alors en Europe, T. F. Powys semble avoir écrit là une profession de foi contre les valeurs de son temps : à l'ordre de participer à l'épouvantable vie collective, il oppose la nécessité de la solitude, de même qu'à l'impératif de travailler pour vivre il répond par l'affirmation du pur bonheur qu'on ressent à ne rien faire : « Je me demande si l'on comprendra jamais que le monde n'est pas fait pour le travail, mais pour la joie. »
-
Mes favorites
Vita Sackville-West, Graham Rust
- Klincksieck
- De Natura Rerum
- 18 Septembre 2020
- 9782252044940
Quand Virginia Woolf, aussi fascinante et au venin aussi meurtrier que cette horreur, la vipère du Gabon (Bitis gabonica) la mord au coeur en lui disant qu'elle écrit « de l'extérieur » - sous-entendu qu'il vaudrait mieux qu'elle fasse autre chose - Vita Sackville-West aurait pu répondre qu'elle, Virginia, ne connaissait rien au jardinage, occupation tout aussi meurtrière, si on la conçoit comme un des beaux-arts.
Elle ne le fit pas, sans doute parce qu'elle était trop blessée, trop généreuse et, même si c'est démodé, trop bien élevée pour faire ce genre de répartie.
Il faut lire ce petit livre, musical comme un jardin Anglais, pour retrouver à la fois l'artiste et la jardinière, c'est-à-dire aussi bien des images de rêve que des conseils pratiques à toutes celles (ceux) qui ont ou désirent avoir la main verte La main d'un maître, écrivait Rimbaud, anime le clavecin des prés.
-
« Le pinson des arbres, dans l'Est Londonien, les yeux crevés par des aiguilles rougies au feu, chante aussi en prison quand il s'est habitué à son existence dans le noir et, bien nourri, éprouve un bien être passager qui l'incite à la mélodie. Mais personne, pas même l'amateur d'oiseaux le plus dépravé, ne pourrait soutenir un seul instant que la joie du petit captif aveugle, qu'il chante ou se taise, est le moins du monde comparable à celle du pinson chantant en avril « au sommet du buisson », au milieu du grand monde ensoleillé, bleu au dessus, vert au dessous, avec le désir et le pouvoir, à la fin de la mélodie, de s'envoler rapidement à travers les champs de cristal de l'air vers d'autres arbres et d'autres bois. » À sa mort, en 1922, W. H. Hudson légua la totalité de ses droits d'auteur - ses oeuvres complètes comportent vingt quatre volumes - à la Société Royale pour la Protection des Oiseaux.
-
Le cycle de Gormenghast ; Titus d'enfer, Titus dans les ténèbres, Gormenghast, Titus errant
Mervyn Peake
- Omnibus
- 3 Mai 2018
- 9782258107748
Titus d'Enfer (1946) - Titus dans les ténèbres (nouvelle, 1956) - Gormenghast (1950) - Titus errant (1959).
Dans le château de Gormenghast, aux proportions si démesurées que des parties entières restent inexplorées, vit la famille Tombal : lord Tombal, comte d'Enfer, neurasthénique et plongé toute la journée dans les livres de sa bibliothèque, Lady Tombal, la comtesse, qui se partage entre ses chats et ses oiseaux, leur fille Fuchsia, adolescente solitaire et imaginative, d'autres membres et pléthore de notables et gens de maison, tous plus pittoresques, voire grotesques, les uns que les autres. Ce petit monde est régi par des rites et des traditions immuables et compliqués. L'histoire commence alors que naît Titus, 77e comte d'Enfer, dans l'indifférence générale. Parallèlement, le jeune Finelame s'échappe des cuisines où il était commis ; malin et manipulateur, il investit peu à peu le château et va en briser l'équilibre précaire, par l'incendie de la bibliothèque tout d'abord, qui va mener le comte à la folie, puis à la mort.
C'est dans cet univers déconcertant, baroque, halluciné et presque maléfique que grandit Titus, qui s'accommode de plus en plus difficilement du cérémonial du protocole et rêve du monde extérieur, lui qui ne connaît que le château. Le dernier volet, Titus errant, le voit fuir Gormenghast et partir à la découverte d'un ailleurs qui lui est complètement étranger et dont il est exclu.
-
Les pages recueillies par Patrick Reumaux se succèdent comme celles d'un herbier. Les courts épisodes décrits laissent libre cours au passage des saisons, au vol des cormorans et des albatros, aux rapines des renards et aux jeux carnivores des belettes et des hermines. Ils ont pour décor le Somerset, où Llewelyn Powys passa toute son enfance.
Chaque fleur est nommée par son nom et dépeinte avec une précision affectueuse. Le paysage prend, sous sa plume, une vivacité de couleurs et de formes. Llewelyn Powys invite à la contemplation de l'éphémère en s'arrêtant sur des détails, en nous contant ce que le crépuscule et l'aube cachent au regard. Il livre des impressions, comparables aux Rêveries du promeneur solitaire de Rousseau, qui laissent à la nature, dans toute sa dimension poétique et métaphysique, le soin de nous émerveiller.
-
Le parfait pêcheur à la ligne
Izaak Walton
- Klincksieck
- De Natura Rerum
- 9 Novembre 2017
- 9782252041000
Cet ouvrage se présente comme un manuel, un traité de pêche à la ligne, aux intentions précises et pratiques. Son intérêt et son utilité concernent à la fois le praticien de ce sport, ou de cet art nous dirait Walton, que le gastronome qui en déguste les produits.
Si alléchantes qu'en soient les recettes, si amoureusement ouvrées que soient les descriptions des « mouches », ce traité se distingue de manière évidente d'un genre fort à la mode au XVIIe siècle, en Angleterre comme en France, et qui vise à déployer, en virtuose, l'intégralité d'une technique ou d'un art. Ainsi, pouvait-on se procurer, en amateur, le Complete Gardener aussi bien que la Chirurgie complette...Le titre original de ce traité ne déroge pas à la règle (The Compleate Angler) mais élève l'exercice au rang de justification quasiphilosophique des vertus de la pêche : « un art digne du savoir et de la pratique d'un sage ».
De digressions en digressions, nous sinuons à l'ombre d'un fleuve où musique, religion et poésie s'écoulent avec éloquence. C'est que la pêche invite non seulement à la contemplation mais aussi au ravissement, en toute quiétude.
-
Publié en 1863, un an avant Oncle Silas, La maison près du cimetière est tout à la fois un thriller, une romance, et un " divertissement " centré sur le Temps et le Langage. Roman sans héros, peuplé de personnages masculins et féminins qui s'entrecroisent sans relâche, on y trouve banquets et ripailles tout autant que chantages, enterrements clandestins à la lueur de la lune, et crânes exhumés... Tout ceci se déroule en 1767, à Chapelizod, petit village près de Dublin, et l'on y détecte sans doute plus encore que dans les autres oeuvres de Le Fanu son goût démesuré pour l'étrange et le surnaturel, mêlé au quotidien d'une Irlande de clergymen, notables, militaires, et traîne-la-faim...
Joyce relisait ce livre chaque fois qu'il souhaitait s'empêcher de dormir. Un roman noir tout ce qu'il y a de classique en apparence (Le Fanu fut dans ce registre le seul rival de Wilkie Collins), mais ficelé à l'irlandaise, c'est-à-dire sans marchander sur les ingrédients indispensables : le whiskey, la mort violente. et le surnaturel.
Quelques messieurs plus ou moins distingués aiment à se réunir le soir au club, dans une bourgade des environs de Dublin, pour dire tout le mal qu'ils souhaitent au monde et tout le bien qu'ils pensent d'eux-mêmes. jusqu'au jour où ils se retrouvent avec un joli crime sur les bras. Un thriller particulièrement retors qui se sert d'un fait-divers faussement banal pour nous rendre complices du pire ; en nous invitant à nous poser la seule question qui compte : « Comment tuer le temps ? » Que la bonne société victorienne en profite au passage pour se faire déculotter et fesser d'importance ne saurait nuire, on s'en doute, à notre plaisir. Mais Le Fanu a encore d'autres surprises dans son terrible sac - qu'il n'est bien sûr pas question de révéler ici.
Qu'un tel livre - nous voulons dire d'une si violente modernité - n'ait jamais été traduit en français à ce jour est à la fois consternant et rassurant : il nous reste encore (Elizabeth Bowen dixit) des chefs-d'oeuvre à découvrir !
-
Sur le manoir de Morley Court règne Richard Ashwood.
Tyron sadique, il n'hésite pas à spolier sa fille et des biens et à la promettre à un vieillard odieux. Quant à Henry, le fils, il ne vaut guère mieux... Jouisseur et joueur éffréné, il vend sa soeur pour rembourser ses dettes. De machinations sinistres en rebondissements inattendus, de tripots mal famés en salons aristocratiques, Le Fanu réunit dans le Dublin du XVIIIe siècle tous les ingrédients de la littérature populaire du complot.